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Contes de papier – Andersen à la pointe des ciseaux

Créé en 2021 par la Com­pa­gnie Arti­choke, Contes de papier est un spec­tacle poé­tique qui rend hom­mage à Hans Chris­tian Ander­sen et à son art mécon­nu du papier décou­pé. Mêlant musique, théâtre et marion­nettes, le spec­tacle explore les rêves, les ambi­tions et les fra­gi­li­tés humaines à tra­vers les contes intem­po­rels de l’écrivain danois.
À l’occasion d’une reprise du spec­tacle, Sophie van der Ste­gen, sa créa­trice, revient sur la genèse du pro­jet, les liens entre Ander­sen et les Schu­mann, et la por­tée pro­fon­dé­ment actuelle de ces récits de papier.

D’où est venue l’idée de Contes de papier ?

Sophie van der Ste­gen :
L’idée du spec­tacle est née de ma décou­verte de la pas­sion qu’avait Hans Chris­tian Ander­sen pour les papiers décou­pés — un aspect de son œuvre sou­vent mécon­nu. Ces décou­pages, loin d’être de simples passe-temps, fai­saient plei­ne­ment par­tie de sa démarche artis­tique. Ander­sen lui-même a expri­mé cette dimen­sion dans un poème :

Dans ses papiers décou­pés
Ander­sen a mis
Toute sa poé­sie ;
Joyeux méli-mélo
De formes et de cou­leurs
Au bout de ses ciseaux.

Chez lui, cet art du papier décou­pé, à la fois colo­ré, poé­tique et joyeux, est indis­so­ciable de son tra­vail d’écrivain et de poète. Envi­ron un mil­lier de ces œuvres sont encore conser­vées au musée d’Odense. Quand sur­gis­sait son ins­pi­ra­tion, Ander­sen s’asseyait par terre, ciseaux et papier dans les mains, entou­rés de quelques enfants qui devaient se tenir à une dis­tance pru­dente. Alors Ander­sen, qui depuis son enfance rêvait de deve­nir acteur, comé­dien ou chan­teur d’opéra, se sen­tait-il réel­le­ment dans son élé­ment. Sa façon de racon­ter était une per­for­mance théâ­trale en soi. Quand il com­men­çait à tour­ner les frag­ments colo­rés à la pointe de ses ciseaux, aucun des enfants qui l’entouraient ne savait ce qui allait sur­gir. Il aimait com­men­cer par une petite his­toire et impro­vi­sait un conte en rela­tion avec le thème de son décou­page.

Au moment de créer Contes de papier en 2021, j’ai eu la chance de col­la­bo­rer avec deux artistes découpeur·euses, Julie Michaud et Chris­tophe Moris­set, qui se sont ins­pi­rés des motifs d’Andersen pour ima­gi­ner la scé­no­gra­phie et les marion­nettes en papier du spec­tacle.


Pourquoi avoir choisi les contes d’Andersen en particulier ?

Sophie van der Ste­gen :
Ce qui fait la force et le génie des contes d’Ander­sen, c’est leur ambi­guï­té — cette richesse de sens et de lec­tures pos­sibles. Si je devais résu­mer le pro­pos du spec­tacle, je dirais qu’il aborde avant tout le thème de l’ambition, qu’elle soit artis­tique ou non. Ander­sen le ques­tionne sans cesse à tra­vers une gale­rie de per­son­nages pro­fon­dé­ment humains : le sol­dat de plomb, la boîte d’allumettes, la théière fêlée, la petite sirène ou encore le petit sapin.
Tous rêvent de gran­deur, d’un ailleurs inac­ces­sible, et s’y risquent mal­gré tout, avec cou­rage — par­fois au prix de leur vie. Contes de papier parle de ces rêves que l’on porte enfant et pose, en creux, une ques­tion aux adultes : qu’avez-vous fait de vos rêves d’enfance ?


Pourquoi avoir choisi la musique de Robert et Clara Schumann ?

Sophie van der Ste­gen :
Le lien entre Hans Chris­tian Ander­sen et les Schu­mann est à la fois his­to­rique et poé­tique. En 1837, le poète alle­mand Adel­bert von Cha­mis­so tra­dui­sit plu­sieurs poèmes d’Andersen en alle­mand. Séduit par ces textes, Robert Schu­mann en com­po­sa un cycle de Lie­der qu’il dédia à l’écrivain danois.
Quelques années plus tard, lors d’une tour­née à Copen­hague, Cla­ra Schu­mann ren­con­tra Ander­sen et l’invita à leur rendre visite en Alle­magne. En 1844, de pas­sage à Leip­zig, Ander­sen accep­ta cette invi­ta­tion : les Schu­mann orga­ni­sèrent alors une soi­rée musi­cale en son hon­neur. Cla­ra prit place au pia­no, tan­dis que la can­ta­trice Livia Frege inter­pré­ta les Lie­der ins­pi­rés de ses poèmes.
Ce moment d’échange entre la musique et la lit­té­ra­ture, entre l’Allemagne et le Dane­mark, m’a paru d’une grande beau­té. Il sym­bo­lise ce dia­logue intime entre la parole et le son, la poé­sie et la musique, que j’ai vou­lu faire revivre dans Contes de papier.

Quels sont les contes repris dans le spectacle ?

Sophie van der Ste­gen :
Contes de papier tisse un fil entre plu­sieurs récits d’Ander­sen, par­mi les­quels Le Vaillant sol­dat de plomb, Les Allu­mettes, L’Ombre, Le Mon­treur de marion­nettes, La Théière, La Petite Sirène, La Petite fille aux allu­mettes ou encore Le Lin.
Ces his­toires tra­duisent les dif­fi­cul­tés qu’Andersen a ren­con­trées pour affir­mer sa sin­gu­la­ri­té face aux normes de son temps, mais aus­si son désir de recon­nais­sance et la quête de sens qui tra­verse toute son œuvre.
Le spec­tacle aborde ain­si, avec humour et poé­sie, des thèmes uni­ver­sels et tou­jours actuels : l’ambition, la des­ti­née, la mobi­li­té sociale, le cycle de la vie… mais aus­si des ques­tions contem­po­raines comme l’écologie, le recy­clage ou même le…coro­na­vi­rus !
C’est un spec­tacle idéal pour la sai­son hiver­nale : l’hiver y règne en maître, mais le prin­temps, lui, n’est jamais bien loin. 🌸

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